• 16. Prémices d’Alizé

     

    16. Prémices d’Alizé


     

                            Les conditions normales pour la saison sur la côte portugaise, se sont rétablies et les fichiers Grib me laisse entrevoir la possibilité de reprendre la Mer. Cela fait 10 jours que septembre s’est affiché au calendrier de la cabine. Oh, pas de ces calendriers de cabine de routier avec pour décor de magnifiques camions un peu en arrière plan d’une starlette qui n’a pas froid car elle n’est vêtue  que des pensées que les chauffeurs leur portent. Là non, non c’est un calendrier bien sage, la starlette n’est autre que ma petite fille qui déguste avec délectation un cornet de glace, l’œil malicieux qui regarde au dehors de la photo.

    16. Prémices d’Alizé

    Deux bateaux de rencontre doivent eux aussi partir pour Madère et nous nous sommes concertés pour partir ensemble. Ils se nomment : Andiamo pour l’un et Marléna pour l’autre.  Nous avons dégusté un verre ou deux de Vinho tinto élaboré en ce pays à partir de Uva de cabernet sauvignon en analysant les prévisions météo pour les jours à venir, dans le cockpit de Marléna.

    16. Prémices d’Alizé Le départ doit avoir lieu demain il est  décidé, dans l’après midi vers les 17 heures. Cela ne me séduit qu’à moitié, je préfère ne pas attendre une fin de journée pour me mettre en route, même si le vent ne devrait s’établir de Nord Ouest qu’à partir de 17 heures.

    Le 11 septembre jour d’un triste anniversaire, au matin le temps est beau une brise de nord souffle tel un courant d’air frais sur le mouillage de nos trois bateaux, je suis de bonne heure sur le pont la vadrouille (balai à frange dit balai espagnol qui est super pratique pour le nettoyage du pont des bateaux) courant de ci de la pour piéger les gouttes de rosée qui mouillent  le pont. Sur Andiamo rien ne bouge, ni plus que sur Marléna. Exocet est prêt pour appareiller, la Mer a remplacé dans mes veines le sang qui y circule, le temps est propice à ne pas attendre, je ne veux pas forcer la main à mes acolytes mais ne souhaite pas non plus me conformer à leur choix dicté par des contingences que j’ignore mais qui me sont étrangères aussi je saute dans l’annexe alors que de l’église juste au dessus du quai ou les pêcheurs rentraient de la Mer rangent leurs filets, les dix coups du battant de la cloche annoncent aux habitants de Ferragudo l’heure.16. Prémices d’Alizé 

    Sur Marléna j’ai aperçu Hubert sur le pont à la préparation du départ, je vais donc lui faire savoir que je vais partir en éclaireur pour profiter du jour pour faire le plus de route possible avant la nuit. Cela pour les pièges qui ne sont pas rares prés des côtes, filets de pêcheurs avec leurs mâtereaux et les bidons qui flottent reliés par des bouts en surface qui peuvent se révéler préjudiciables pour nos hélices. Mais il y a aussi les chalutiers qui croisent au large sans se préoccuper des voiliers qui naviguent vers leur route. Puis se sera le rail des grands navires qui arrivent  de Gibraltar et remontent sur le long des côtes Portugaises, un peu de Mer libre puis le rail inverse celui pour les bateaux qui descendent  du nord pour rejoindre la Méditerranée Puis ce sera le large, la haute Mer, la navigation hauturière bien autre que la navigation à rase cailloux ou que les petites traversées qui ont fait le quotidien d’Exocet depuis début Juin.

    10 heures 34 minutes les préparatifs sont terminés, l’annexe est remontée haut sur la jupe arrière.

    16. Prémices d’Alizé

    le moteur hors bord sur son support dans le portique, le Perkins tourne, le guindeau remonte la chaine du mouillage puis l’ancre rejoint le davier à l’étrave d’Exocet, un bout vient la sécuriser au cas où elle voudrait à l’insu de mon plein gré replonger dans l’abime. La marche avant  enclenchée, le bateau donne ses premiers tours d’hélice, je lui fais faire une petite boucle pour aller dire au-revoir aux copains. Guenter d’Adiamo est dans son annexe accroché à Marléna pour discuter, je donne des coups de trompe pour dire mon départ, Hubert avec la corne de brume, tel un clairon de cavalerie joue une sonnerie que je ne peux reconnaitre mais c’est sympa assurément. Ils doivent aller à la capitainerie pour affaire, un rendez vous leur est fixé à 11 heures. Farida sort du carré de Marléna pour de la main et des bras tel un sémaphore salue Exocet et son capitaine je réponds à ses signes d’amitié puis dirige l’étrave vers la sortie des passes, vers la haute Mer, vers le rêve d’une vie le grand large, l’aventure.

    Je suis seul avec mon bateau qui est quelqu'un cependant mais ce rêve j’aurais bien aimé le faire partager, mais les rêves des uns ne sont pas ceux des autres je suis content quand même d’être là même si mon cœur a un peu de mal de cette déchirure. Mes amours ont bien aussi leurs affaires, leurs soucis, leurs vies, leurs routes. Pour paraphraser un dicton Breton : il y a trois sortes d’hommes, les vivants, les morts, et ceux qui vont en Mer.

    16. Prémices d’Alizé

    Passé les feux des digues de Portimao, que je ne reverrais surement plus jamais, quoi que, qui peut dire. C’est un peu la confusion sur le plan d’eau, des voiliers allant d’ici ou de la, des barques de pêcheurs amateurs ayant jeté leur grappin ou bon leur semble, plus loin, les sardiniers qui rentrent  au port bas sur l’eau, surement chargés d’une bonne pêche, avec leur puissante annexe accrochée  à leur poupe, et sur l’horizon les chalutiers qui semblent immobiles sous leur panache de fumée noire que crache les moteurs forcent pour tirer les filets qui piègent les poissons. Mais cela qui fait un écran sur l’avant d’Exocet en avançant s’ouvre presque sans avoir à toucher à  la barre. Un voilier coupe ma route va vers mon bâbord. Une barque de pêche est là sur tribord je passe suffisamment loin pour ne pas gêner. Pour une autre plus loin je donne d’une poussée sur le bouton du pilote et c’est de dix degrés que celui ci s’écarte, la barque ne verra pas sa position devenir risquée même s’il n’est pas recommandé de mouiller dans l’axe d’un chenal. Les chalutiers qui semblaient être à la queue leu leu sont bien distants les uns des autres Exocet passe sans avoir à toucher la barre. Maintenant sur le lointain c’est deux voiles qui sont visibles la première se dirige vers la gauche le temps que j’arrive à son niveau ce bateau sera bien loin à gauche va t ‘il vers l’Espagne, peut être qu’il ne fait qu’un rond dans l’eau, le deuxième lui semble partir vers le large irait’ il lui aussi à Madère ?

    De ce temps alors que c’est le moteur qui propulse Exocet, j’ai établi la grand voile entière elle est bordée au plus prêt et profite du vent apparent que donne la vitesse du bateau pour apporter une petite contribution à  la marche du navire. Le vent bien que faible a la gentillesse d’arriver de tribord et pas dans l’axe du bateau même si peu s’en faut. Je me hasarde à dérouler le génois qui lui aussi travaille sans rechigner. Ces voiles étaient depuis bien des jours au repos elles languissent comme moi de prendre le large.

    A 14 heures je coupe le moteur après l’avoir réduit au fur et à mesure que le vent montait sur l’échelle de beaufort (celle qui donne les caractéristiques du vent.) nous étions sur le premier échelon puis le second et le troisième super.

    16. Prémices d’Alizé

    C’est à partir de là que les voiliers fonctionnent puis à force 4 ils sont vivants, à  force 5 ils donnent tout leur potentiel après il faut envisager la réduction de voilure, la prise de ris.

    Je descends avec cette jolie brise un peu plus Sud que ma route directe sur Madère mais ce n’est que mieux je m’écarte de la côte plus directement.

    Dans mon Sud un cargo croise, je l’ai sur mon écran AIS, cela m’indique :

    16. Prémices d’Alizé

    Son nom : Marfret. Le gisement par rapport à Exocet : 188°. La distance à laquelle il est : 4,8 milles nautique. Et plus d’information en ouvrant un sous menu. C’est très pratique d’avoir ces informations à bord mais il y a un mais les bateaux ont obligation d’avoir à leur bord le système qui émet les informations via la radio VHF à partir d’une certaine taille. Si l’appareil ne fonctionne pas, s’il est arrêté, volontairement ou par accident pas d’infos n’apparaitront aux autres bateaux. A l’heure ou j’écris ce texte après 57 heures de navigation deux bateaux que j’ai de visu repéré n’apparaissaient pas sur mon AIS. Pour le premier son radar en fonction a été capté par un autre instrument que j’ai à bord, un Mer Veille, lui se contente de repérer les radars qui fonctionnent dans un environnement assez large et par une alarme sonore attire l’attention et donne une direction approximative par des LED qui clignotent.

     16. Prémices d’Alizé

    Le deuxième lui n’a été repéré ni par AIS ni par Mer Veille seulement de visu, comme quoi il faut effectuer une veille attentive, ce qui veut dire une inspection de tout l’horizon par temps clair tous les quarts  d’heure. C’est ce que je pratique de jour comme de nuit je fais l’écureuil comme le dit mon ami Guy avec qui nous avons ramené Vamos des Antilles.

    Un minuteur de cuisine me permet de régler facilement et rapidement le temps que je souhaite avant que la sonnerie ne se déclenche. Alors je grimpe les quatre marches pour faire une inspection tout autour du bateau, je fais l’écureuil.

    Quelle belle navigation j’ai eu pour cette descente avec l’alizé Portugais la mer plate pour commencer, puis une longue houle arrivant par derrière le bateau lui donnait un complément de vitesse. Je n’ai pas eu à changer de bord de ces quatre jours je suis parti avec mes voiles du côté bâbord du voilier, (gauche) j’étais tribord amure, (recevant le vent du côté tribord)

     16. Prémices d’Alizé

    Je n’ai pas eu à réduire la voilure, je me suis juste posé la question en mon for intérieur le bateau glissait sur les flots à 10 nœuds mais cela n’a pas duré très longtemps, j’ai bien fait de ne toucher à rien.

     

    La seule manœuvre que j’ai faite c’est l’envoie  du spi pour profiter du petit air qui ne gonflait plus le génois. J’avais le choix soit je lofer, (modifier sa route en allant plus vers le vent) mais je ne voulais pas monter au dessus de la route. Je pouvais également tangonner le génois au vent, (dans ce cas, le génois aurait été sur le côté tribord forcé d’y rester par le tangon alors que la grand voile restait sur bâbord, les voiles en ciseaux) ou troisième solution l’envoie  du spi tangonné sur tribord, (donc bâbord amure ;)

    Sur la photo vous voyez le tangon qui part du mât pour pousser vers l’extérieur le spi. Cela aurait été pareil avec le génois en lieu et place du spi, mais le tissu étant bien plus lourd cela n’aurait pas bien fonctionné surtout au début, après le vent étant plus fort cela aurait bien marché. Je l’aurais gardé plus longtemps.

     16. Prémices d’Alizé

    Pendant trois heures j’ai naviguais comme cela un plaisir certain. Pour rentrer le spi cela n’a pas été  évident il faut être à la fois à l’avant et à l’arrière. Je ferais l’acquisition d’une chaussette qui me facilitera cette manœuvre en enfermant le spi du haut vers le bas dans une longue manche de tissu : la chaussette, une fois comme cela le spi n’est plus gonflé par le vent et il devient facile de le descendre sur le pont, l’affaler.

    16. Prémices d’Alizé

    Ce matin, 14 septembre alors que le soleil jette des gloires sur la mer, dans le lointain à l’ opposé se profile l’ile de Porto Santo. Le vent a presque disparu aussi c’est le moteur qui lui seul terminera cette belle navigation, cette prise de contact avec l’alizé.

     Ces prémices d’alizé.

     


    Tags Tags : , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :